Comment l’Education nationale veut améliorer le remplacement des profs

| 16 octobre 2016 | 0 Commentaire

Ecoliers répartis dans d’autres classes en primaire, élèves privés d’enseignement dans le secondaire… Chaque année, les parents d’élèves dénoncent les heures de cours perdues. Si la situation s’est légèrement améliorée, la rue de Grenelle devrait faire des annonces, mardi, pour améliorer le remplacement des profs absents.

C’est une opération de déminage… avant la saison des grippes, des gastros et le pic des cours non assurés. Mardi, à la veille des vacances de la Toussaint, la ministre de l’Education doit faire des annonces pour améliorer le remplacement de enseignants absents. A quelques mois de la présidentielle, le temps est venu de s’attaquer à cette question sensible. La FCPE, principale fédération de parents d’élèves, en a fait un cheval de bataille au printemps dernier. Sa présidence Liliana Moyano reste d’ailleurs prudente : « Nous ne nous attendons pas à Noël avant l’heure. Mais le ministère doit montrer que ce dossier fait partie de ses priorités. »

« Nous avons créé un kit ‘non remplacement' »

En préambule, la rue de Grenelle se décernera sans doute un satisfecit. Car Najat Vallaud-Belkacem aime le rappeler : « les choses s’améliorent ». Dans le premier degré, près de 2.200 postes de remplaçants ont été créés entre 2013 et 2015 (après la suppression de 1.500 sous le quinquennat Sarkozy). A la rentrée 2016, il y en aurait, selon certains, 1.350 de plus! Dans le secondaire, le taux d’heures de classe non assurées faute de remplaçant serait passé de 3,9% en 2003-2004 à 2,9% en 2014-2015. Sur le terrain, on note aussi des progrès. Le site Ouyapacours, qui invite les parents à signaler les cours supprimés dans l’établissement de leur enfant, comptabilisait ainsi 2.500 jours d’enseignement perdus un mois après la rentrée, moitié moins qu’à la rentrée 2015.

Mais tout n’est pas réglé. Mi-octobre, le nombre de jours perdus s’élève déjà à 5.000. Et les signalements se multiplient : des sixièmes attendent toujours un prof d’histoire à Sevran (93). Des terminales S restent privées de physique-chimie à Bellignat ou de maths à Oyonnax (01). Un collège a fini par recruter un prof de physique-chimie via Pôle Emploi à la Garenne-Colombes (92). Des terminales technologique n’ont eu aucun cours de techno – coeff 7 au bac – à Saint-Ouen-L’aumône (95). « Nous avons créé un kit ‘non remplacement’ pour les parents, explique Bruno Brisebarre, président de la FCPE du Val d’Oise. Il s’agit d’abord d’écrire à la ministre. Puis, s’il le faut, d’aller devant les tribunaux pour non continuité du service public de l’éducation ».

38% des absences de moins de 15 jours remplacées

Le ministère prend donc les devants. Promis, des efforts devraient être faits en matière de transparence. En communiquant davantage avec les familles : « En temps réel, en précisant le motif et la durée prévue de l’absence », avance un membre de la FCPE. En identifiant une personne dédiée par académie, espère un autre. En créant de nouveaux indicateurs, nationaux et académiques : « Le but est d’avoir une évaluation plus fine du nombre d’heures remplacées, de distinguer les congés de moins ou de plus de 15 jours, assure Valérie Marty, présidente de la PEEP, autre association de parents d’élèves. Actuellement, il n’y a aucune fiabilité concernant les absences de moins de 15 jours ». Ces dernières sont justement les plus difficiles à gérer : selon la rue de Grenelle, seules 38% d’entre elles sont remplacées au collège et au lycée (contre 97% pour les absences de longue durée).

«Stages, formations, réunions pour préparer les sujets d’examen ont lieu sur les heures de classe…»

« Nous pouvons améliorer notre circuit de remplacement pour qu’il y ait plus de fluidité et de réactivité », estimait la ministre de l’Education en avril. Mais comment? Il faut, par exemple, « faire en sorte que si l’on ne trouve pas de remplaçants dans une circonscription, on puisse aller chercher ceux de la circonscription voisine ». Dans le premier degré, chaque remplaçant est actuellement rattaché à un territoire : zone d’intervention localisée (ZIL), dans un rayon de 20 km, pour les absences de courte durée, département pour les absences dépassant 15 jours. Demain, le système devrait être assoupli. Certains évoquent même une fusion possible entre les deux catégories (c’est déjà le cas dans certains académies). D’autres, l’idée « de revoir les zones d’affectation et de fonctionner avec des bassins beaucoup plus larges ».

Dans le secondaire, tous les collèges et les lycées devraient mettre en place un protocole de remplacement pour répondre aux absences de courte durée. En principe, le document est obligatoire depuis 2005. Mais dans les faits, il n’existe pas partout, et reste peu appliqué : « Ces remplacements se font sur la base du volontariat. En réalité, on trouve peu de volontaires », explique Philippe Tournier, secrétaire général du Snpden, principal syndicat des chefs d’établissement. Autre piste : « Il faut arrêter de convoquer les enseignants sur les heures de cours. La moitié des heures perdues aujourd’hui sont le fait du fonctionnement de l’Education nationale, dénonce M. Tournier. Stages, formations, réunions pour préparer les sujets d’examen ont lieu sur les heures de classe… »

Le rôle de la médecine de prévention

Enfin, le ministère devrait s’attaquer au problème des absences « perlées » : ces profs qui manquent deux jours, reviennent trois jours, disparaissent à nouveau… Un phénomène qui hérisse les parents d’élèves. « Face à ce type d’absence, réagissait la ministre en avril, au bout de la deuxième fois, l’enseignant aura un rendez-vous systématique avec la médecine du travail pour prendre une décision claire pour tout le monde ». A voir si les annonces de mardi iront jusque-là. Le rôle de la médecine de prévention devrait en tout cas être réaffirmé. Des profs en souffrance pourraient voir leur service allégé.

«Le principal problème, c’est la crise du recrutement. Les Capes de math, d’anglais ou de lettres ne font pas le plein»

Cela suffira-t-il pour éradiquer ce serpent de mer que constituent les absences non remplacées? La Cour des Comptes et l’Institut Montaigne, think-tank libéral proposaient des pistes plus radicales. Par exemple, annualiser le temps de travail des profs : un enseignant, absent en septembre-octobre, pourrait alors transférer ses heures à ses collègues d’autres disciplines, puis les rattraper à son retour, à la fin de l’année scolaire si besoin. On pourrait aussi instaurer la « bivalence » : des profs enseignant deux disciplines, pour faciliter les remplacements. Mais ces suggestions ne font pas l’unanimité. Pas sûr que le ministère ait envie de lancer le débat, au risque de braquer une partie du corps enseignant.

Les profs, eux, dénoncent surtout le manque d’effectifs. « Dans le premier degré, nous n’avons pas encore retrouvé le nombre de remplaçants d’il y a 5 ou 6 ans », estime-t-on au Snuipp, syndicat majoritaire à l’école primaire. « Le principal problème, c’est la crise du recrutement, renchérit-on au Snes-Fsu, principal syndicat du secondaire. Les Capes de math, d’anglais ou de lettres ne font pas le plein. »

Les parents d’élèves semblent également dubitatifs. Sans attendre les annonces du ministère, la FCPE du 93, en première ligne sur le dossier remplacement, prévoit déjà une contre-conférence de presse mardi prochain. « La ministre ne fera que des propositions techniques, prédit Rodrigo Arenas, président départemental. Aujourd’hui, il faut avoir le courage politique de dire quelle école on veut pour l’avenir pour répondre au manque de vocations ».

Marie Quenet – Le Journal du Dimanche

 

Catégorie: Activités du CDPE

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